Pourriez-vous nous expliquer en quelques mots la manière dont le projet a vu le jour ? Quel a été l’objectif ?
C’était une réponse à un appel à projet de l’Agence Régionale de Santé (ARS). Une consultation de tabacologie existait déjà au sein du centre mais ce n’était pas structuré comme un Lieu de Santé Sans Tabac. Il n’y avait pas suffisamment de signalétique ni toute la partie communication. Il n’y avait pas non plus suffisamment d’échanges avec d’autres professionnels de santé à l’extérieur du centre.
Comment appréhender la prise en charge du tabagisme en service de cancérologie ? Quel est le parcours de soins du patient chez vous ? Y a-t-il des différences par rapport aux parcours de soins des autres établissements ?
Il y a deux manières systématiques :
- Quand les patients arrivent chez nous pour une première consultation ou une première admission pour la prise en charge de leur cancer, l’équipe de soins questionne sur le statut tabagique. Un repérage est automatique.
- Durant la prise en charge, on peut aussi être amené à discuter du statut tabagique du patient. Notre centre soigne les cancers du poumon et les cancers ORL. 80 à 90% de cancers sont induits par le tabac.
« On fait face à des cancers dont le facteur de risque est le tabac donc on est un peu plus sensible à ces problématiques que dans un hôpital qui soigne des pathologies hors cancer ».
Comment organisez-vous les consultations ?
Soit il y a une consultation d’addictologie ou de tabacologie qui est faite à la demande du patient, parce qu’il a un souhait de sevrage. Sinon lors de la consultation d’oncologie, on peut lui proposer une aide au sevrage s’il n’a pas arrêté de fumer.
De plus, en phase pré-opératoire, cela pose problème pour l’anesthésie si le patient fume trop.
« L’anesthésiste peut solliciter l’infirmière de tabacologie pour qu’elle aille voir le patient avant l’intervention ».
Quelles difficultés avez-vous rencontrées au cours de ce projet ? Comment y avez-vous remédié ?
Pour la mise en route, il fallait d’abord aller convaincre la direction et les instances institutionnelles. Cela n’a pas été une difficulté pour nous mais il faut passer par là avant tout chose. Notre directeur général était motivé par le sujet. Cela prend du temps, il faut plusieurs semaines voire plusieurs mois pour mettre les choses en place. Si je reprends chronologiquement, on a commencé à discuter au mois d’Août et au final le Lieu de Santé Sans Tabac est effectif à partir du 31 Mars donc ça fait 7 mois pour mettre en place le projet et démarrer.
Ensuite, l’aspect financier est à prendre en compte. Le fait d’avoir répondu à un appel a projet a permis de financer la signalétique, une formation pour une infirmière en tabacologie, etc. Cela a permis de mettre en place concrètement les actions. Sans cela, il n’y a pas possibilité d’agir.
« Il faut prendre du temps pour mettre les choses en place convenablement pour que cela fonctionne ».
En général, le projet a-t-il été bien accueilli ?
Il y avait quelques salariés qui ne croyaient pas trop au projet au départ. Cela peut être un frein. Mais on a montré que les choses étaient en place, qu’on avait un soutien de l’ARS, de la direction et de Hauts-de-France Addictions. Les salariés ont maintenant bien compris les principes. Il reste une zone fumeur à l’arrière de l’hôpital, non visible par le public. C’est bien respecté, on est très satisfait.
« Les choses apparaissaient robustes. Cela a donné confiance aux salariés ».
Le financement de votre projet a pris fin en novembre 2022. Comment comptez-vous pérenniser le projet ?
On a des financements par la Direction Générale de l’Offre de Soins (DGOS). Quand on a un niveau 1 en addictologie, on a un financement.
« On a profité du projet pour mettre en place une Equipe de Liaison et de Soins en Addictologie (ELSA). Elle est composée de deux Infirmières Diplômées d’Etat en tabacologie, d’un cadre de soins de la direction, d’un oncologue-addictologue et d’un psychologue. Ça va permettre de continuer à vivre dans les prochaines années ».
Quels conseils donneriez-vous à un porteur de projet qui se lance dans la démarche LSST ?
S’entourer, ne pas être isolé. Hauts-de-France Addictions apporte les conseils nécessaires.
Il ne faut pas hésiter à se servir des expériences précédentes. Apprendre des échecs permet de rebondir pour faire quelque chose qui va fonctionner.
Nous avions l’expérience de l’Institut Gustave Roussy à Villejuif qui est rentré dans la démarche environ 2 ans avant nous. On avait ce modèle-là pour nous indiquer la route à suivre.
Sur la partie patient et accompagnement de patient, on a des difficultés avec des accompagnants ou des ambulanciers qui viennent et qui fument devant l’établissement, à l’entrée. C’est notre cheval de bataille pour 2023.
« On doit renforcer nos signalétiques et essayer de convaincre sur les prochains mois ».